La LSF , les langues orales et les langues ecrites : pourquoi elles ne se valent pas.
de Harlinah, 2013-aprilo-10
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Lingvo: Français
Harlinah (Montri la profilon) 2013-majo-31 18:51:12
hetinjo:je suppose que nos sensibilités sont éveillées quand nous sommes très jeunes, et on ne peut que tres difficilement les modérer; prendre tous les malheurs du monde sur VOS epaules vous epuise, sans les aiderOui vous avez parfaitement raison.
Mais ce sont des sentiments qui ne se commandent pas.
Du reste je parlais d’un contexte où je serais responsable de ce malheur en devenant entendante au détriment des autres.
Même si l‘audition est mon souhait le plus cher je ne peux me permettre d’accepter ce cadeau si cela doit causer le malheur des autres.
C’est une question de conscience aussi.
Mais c’est vrai que le spectacle de la misère humaine ne m’aide pas à me sentir bien.
Cela n’a rien à voir avec l’âge car j’ai toujours été comme cela.
Je me souviens à une certaine époque je faisais du bénévolat dans une association qui aidait les lycéens et les collégiens dans leurs devoir scolaires.
Je me suis proposée pour aider en français et en mathématiques.
Comme je suis sourde, ils devaient tout m’écrire. Et là autant vous dire que je ne suis pas près d’oublier ce que j’ai vu.
En fin de journée, je rentrais chez moi atterrée esquintée aussi bien physiquement que moralement.
Le niveau était tel que j’étais anéantie par l’ampleur de la tâche. Par où commencer ? Comment rattraper ce qui aurait dû être maitrisé au primaire?
Imaginez, à 14ans, ils ne savent pas chercher dans un dictionnaire !
Je comprends les profs qui en font une dépression.
Et comme si ça ne suffisait pas, il a fallu en plus que je me fasse du mouron au sujet de leur avenir.. Oui c’est inutile mais c’est comme me demander d’arrêter de penser.
Pendant tout le temps que je passais avec eux, je ne pouvais m‘empêcher de me poser la question : mon Dieu que vont-ils devenir ?
Comment vont-ils s’en sortir ? Ont-ils seulement conscience de la dureté de la vie et de leur vulnérabilité ? Savent-ils seulement ce qui les attend ? Comment vont-ils affronter la vie en étant si démunis?
Et encore j’ose espérer que la maladie leur fichera la paix. Les pauvres n’ont vraiment pas besoin de ça. Handicapés ils le sont déjà et sévèrement. Si c’était mon enfant, je crois que je n’en dormirais plus.
Peut être que je dramatise mais moi j’ai bataillé dur et tous ceux que j'ai connu en ont fait autant que moi si ce n’est plus pour arriver à vivre correctement.
Et pour moi vivre correctement ce n’est pas seulement avoir de quoi se nourrir, c’est surtout ne dépendre de personne..
Et ce n’est pas en devenant caissière, télé conseillère ou vigile qu’on peut se le permettre.
Ces métiers sont certes tout à fait honorables mais ce n’est pas avec eux qu’on accède à l’indépendance.
Malheureusement , vu leur niveau c’est tout ce que ces pauvres jeunes pourront espérer.
Harlinah (Montri la profilon) 2013-majo-31 19:29:48
Altebrilas:Ah les militaires! Franchement , ce sont des gens qui gagnent à être connus.
Ça ne date vraiment pas d'aujourd'hui: autrefois, lorsque le service militaire existait encore, il était de bon ton de répondre au colonel, lorsqu'il faisait l'honneur aux soldats de visiter leur cantine, "la soupe est bonne, mon colonel!" - même et surtout si ce n'était pas le cas. L'expression était même passée dans la langue.
Les pouvoirs en place n'ont jamais apprécié les râleurs, car en râlant ils risquent de laisser voir aux majorités de mécontents qu'ils ne sont pas en minorité.
L’école où j'ai fait mes etudes supérieurs au Maroc était militaire.
Je peux vous dire que j'en ai vu des vertes et des pas mûres.
Je vous en parle le sourire aux lèvres parce que ce que nous avons vécu mes camarades et moi , il faut vraiment le voir pour y croire!
Je me croyais désespérément linéaire, puis j'ai rencontré les militaires et là j'ai enfin compris qu'il y aura toujours plus fort que moi.
En fait, ils ont leur logique ou plutôt leurs règles , leur fichu règlement, et jamais ils n’y dérogent même si le Ciel devait leur tomber sur la tête, même si ça allait être la fin du monde le lendemain!
On ne fait pas plus carré et plus borné que ces messieurs que je trouvais inénarrables.
Mais pour tout vous dire, l’ahurissement, la consternation et l'hilarité étaient réciproques.
Eux aussi estimaient qu'on n'en faisait pas deux comme moi.
En revanche ce qui était loin d’être réciproque c'est leur endurance et leur flegme.
Je peux vous dire que j'ai râlé pas tant pour changer les choses - il ne faut pas rêver - mais juste parce que je ne pouvais pas faire autrement. Et quand j’étais mécontente, je ne parlais plus que français ce qui les laissait médusés quand ils n'étaient pas carrément convaincus que j’étais folle. En fait, j'aurais bien râlé en berbère mais je tenais absolument à être comprise.
Résultat, j'avais beau être exécrable, ils ne m'en ont jamais tenu grief.
Et quelques jours avant que je ne quitte l’école, ils m'ont décerné le prix de la miss la plus mécontente de sa promotion.
Maintenant que je vous raconte ça je ne sais même plus si je dois en rire ou pleurer. Difficile de faire plus risible et cynique alors même que le cynisme ne fait pas partie de leur nature et que je ne râlais certainement pas pour remporter un prix!
Le régime militaire a été instauré dans cette école parce que c’était le fief des râleurs et que le défunt roi avait fini par en avoir par dessus le dos. Depuis que cette école est devenue militaire , les grèves ont cessé et les étudiants n'ont pas d'autre choix que de filer droit.
Sans l’aval des militaires , il n'y a pas de diplôme et ce quels que soient vos exploits sur le plan pédagogique.
Il ne s'agissait pas de faire de nous des militaires -même si on sort avec un grade de lieutenant- mais juste de nous interdire de nous exprimer.
Altebrilas (Montri la profilon) 2013-junio-01 20:17:57
hetinjo (Montri la profilon) 2013-junio-02 00:00:24
les militaires . En fait, ils ont leur logique ou plutôt leurs règles , leur fichu règlement, et jamais ils n’y dérogent même si le Ciel devait leur tomber sur la tête, même si ça allait être la fin du monde le lendemain!
On ne fait pas plus carré et plus borné que ces messieurs que je trouvais inénarrables.
et vous avez vous-meme procuré la réponse :
et les étudiants n'ont pas d'autre choix que de filer droit.
Pendant la guerre Vietnam v/USA & Australia, comme bien d'autres australiennes, apres le travail je faisais le porte-à-porte pour recueillir des signatures sur une petition demandant au Gouvernement de retirer ses troupes. Une mère au visage marqué par la souffrance me répondit avec colère : "Mon fils ainé a été tué; j'ai hate que mon second fils ait l'age de s'engager pour aller ven ger son frère, si nous ne gagnons pas cette guerre la mort du premier n'a aucun sens".
Bien qu'évidemment c'est la douleur cruelle qui parlait, je fus attérée. Est-il un moindre mal de suivre ses emotions ou de tenter de "raisonner" ?
Harlinah (Montri la profilon) 2013-junio-08 18:35:47
Altebrilas:Harlinah, il faudra nous écrire un bouquin là dessus... Pourquoi pas en espéranto?Bonsoir Aletbrilas,
Maintenant que vous en parlez je regrette sincèrement de ne pas avoir tenu un journal là-dessus.
J’aurais aujourd’hui de quoi écrire un livre, voire de quoi faire un film.
Habituellement les films inspirés de faits réels sont héroïques ou dramatiques.
Là, ça serait le premier film de ce genre qui pousserait le ridicule et le burlesque à des limites qui, entre deux éclats de rire, ne manqueront pas de nous rappeler que la réalité surpasse souvent la fiction.
C’est vraiment dommage. Et dire qu’à l’époque, je tenais un journal que je ressortais à chaque période militaire pendant les cours. Certains lisent , d'autres papotent, moi j'écrivais. Une manie d'Occidentale pour reprendre les garçons sarcastiques qui venaient néanmoins me demander si je les avais immortalisés dans mon journal.
Malheureusement mon journal à ce moment là, c’était juste pour consigner mes états d’âmes de midinette sans le moindre intérêt pour qui que ce soit !
6 cahiers d’élucubrations qui aujourd’hui me consternent quand elles ne me font pas carrément honte.
Que voulez-vous, j’ai été jeune et puis j’ai toujours aimé écrire.
Quant à écrire un livre en espéranto , eh bien si vous et moi restons vivants le prochain millénaire alors peut être que vous lirez quelque chose signé Harlinah.
Harlinah (Montri la profilon) 2013-junio-08 18:39:29
L’autre jour je disais à une dame que j’étais redevable à la raison d’abord parce qu’elle m’a libérée d’une prison dans laquelle beaucoup de gens s’obstinent à s’enfermer.
Peut-être aussi que ma nature y est pour quelque chose mais il m’est difficile de persister dans ce que ma raison juge négatif ou tout simplement absurde.
A titre d’exemple : je trouve cela complètement inepte d’être jaloux.
Je ne comprends rien au syndrome de Stockholm et je ne conçois pas qu’on puisse continuer à aimer celui qui nous maltraite. Beaucoup de femmes battues sont dans ce cas.
J’ai vu une femme le visage tuméfié qui disait qu’elle préférait être battue que de se retrouver seule. C’était dans un documentaire à l’époque où j’entendais et je ne l’ai jamais oublié. Comment peut-on en arriver là ? En tout cas, c’est un excellent exemple de ce à quoi peuvent vous réduire les émotions.
Quant à nourrir la rancœur, c’est le meilleur moyen de rester attaché à la personne honnie et de se démolir soi-même sachant que la rancœur vous ronge et vous vampirise.
Je suis tout à fait d’accord avec vous pour dire qu’on ne doit pas laisser faire les émotions car alors elles pourraient facilement nous pousser à des extrêmes inimaginables.
Parce que des gens se laissent asservir par les émotions ils en arrivent à tuer et à torturer.
Néanmoins, dans mon intervention précédente, je ne parlais pas de ces émotions négatives mais plutôt de sentiments positifs comme l’empathie et la compassion.
Le spectacle de la misère humaine ne pourra jamais me laisser de marbre ou alors c’est qu’une partie de moi -la meilleure- est morte et dans ce cas là je serai vraiment à plaindre.
Ce sont des émotions d’autant plus fortes qu’aucun conflit de conscience n’est là pour les entraver.
Ma raison me dit comme vous, que ces sentiments sont vains en ce sens qu’ils n’apportent rien aux autres mais elle reconnait aussi que ce ne sont pas ces sentiments qui expliquent mon impuissance. Autrement dit, ce n’est pas en me débarrassant de ces sentiments inutiles que je vais devenir efficace.
Ma logique est neutre et ma conscience ne s’y oppose pas, de ce fait je suis trop faible pour pouvoir y faire face.
Ma logique aussi me dit, il te suffit de te détacher de tes parents pour que tu cesses de souffrir.
En outre c’est une souffrance inutile car elle ne te rendra pas tes oreilles et ne fera pas de tes parents des gens en mesure de t’écrire.
Mais ma conscience trouve cela tout bonnement abject. Mes parents ce sont les gens à qui je dois tout et qui m’aiment telle que je suis. La moindre des choses est de leur en être reconnaissante et de les aimer tels qu’ils sont.
Harlinah (Montri la profilon) 2013-junio-08 18:42:33
Je suis obligée de subir, n’ayant aucune aide ni aucune force pour anesthésier ces sentiments (qui me font souffrir inutilement) et sombrer dans l’indifférence qui m’est pourtant si facile en d’autres circonstances.
Quant à cette dame, je comprends votre réaction mais sans comprendre le raisonnement de cette pauvre femme, je comprends aussi qu’elle n’ait plus tout à fait sa raison.
Perdre un enfant surtout de cette façon là, est une douleur atroce que je n’ose même pas imaginer.
Moi je n’ai jamais perdu d’être cher.
C’est pourquoi, je ne peux pas vous garantir que je ne ferais pas pire à sa place.
Perdre une partie de soi est très douloureux mais perdre un être cher l’est encore davantage.
Les gens qui ont perdu leur enfant, à plus forte raison quand il a été assassiné, disent qu’ils ont cessé de vivre depuis ce jour là. Eux aussi les pauvres se retrouvent condamnés à vivre la mort dans l’âme, à vivoter le cœur brisé, à déambuler comme des mort vivants. Leur seule consolation c’est de savoir qu’ils ne sont pas éternels.
Par conséquent, je ne la jugerai pas et je ne pourrai pas vous dire si ma conscience ou ma logique pourrait résister à une telle douleur. Je n’ai pas d’enfants et je n’ai perdu personne.
C’est aussi la raison pour laquelle je ne voudrai jamais faire un métier comme juge ou avocat.
Je suis incapable de juger ou de condamner alors que je n’ai aucune preuve que je n’aurais pas fait pire que ces criminels si j’avais été à leur place.
Pour comprendre ma positon, lisez l’excellent livre de Patrick Meney : même les tueurs ont une mère. C’est l’interview de Marwan né au Liban dans une famille mixte, qui a grandit avec des rêves de petit garçon, a été comme nous tous un brave type qui ne tuerait pas une mouche et est devenu tueur à gages le jour où la guerre est arrivée dans son village.
Croyez-moi, la frontière entre la vertu et le crime est très mince.
La conclusion est poignante et moi après avoir lu ce livre, je n’ai plus jamais été pour la peine de mort.
Je retiendrai cette citation :
L’individu sombre dans la sauvagerie par incident plus que par tempérament.
Vous trouverez ici d’autres citations ici :
http://www.dicocitations.com/reference_citation/92...
Mais celle qui m’a le plus marquée n’y figure malheureusement pas.
Il disait en substance, que si lui, vous et moi, sommes de braves gens c’est d’abord parce que les circonstances nous l’ont permis.
Bien sûr, il y a aussi des héros qui préfèrent se démarquer des autres quand tout le monde semble avoir cédé aux sirènes de la barbarie.
Harlinah (Montri la profilon) 2013-junio-08 18:55:15
L’héroïsme non plus.
Mais une chose est certaine, la plupart cèderont plus facilement à la sauvagerie qu’à l’héroïsme.
Vous ne me croyez pas ?
Regardez :
http://www.rue89.com/2013/05/16/soldes-a-virgin-et...
La sauvagerie c’est perdre son humanité et pour cela il suffit des fois de ne rien faire.
Je suis une personne qui croit aux vertus libératrices de l’indifférence mais il faut faire attention à ce qu'elle nous libère pas de notre humanité.
La sauvagerie c’est aussi de ne plus être capable de s'indigner et de ne plus s’émouvoir de l'injustice et de la misère.
Je préfère mes sentiments inutiles à ceci même si j'ai parfaitement compris que ce n’était pas ce que vous me préconisiez. Mais entre deux extrêmes , mon choix est fait.
http://www.liberation.fr/grand-angle/0101101763-se...
Les gens se félicitent de ne pas s'en être mêlés alors que n'importe quelle personne ayant une once de conscience ne se regarderait même plus dans une glace.
Ça se passe en France mais dites-vous que ça pourrait arriver n’importe où sur cette planète.
Et encore, ils n’ont même pas l’excuse d’avoir faim ou d’avoir perdu un être cher.
Il est inutile d’avoir honte parce qu’on est français mais je comprends qu’on ait honte parce qu’on est des êtres humains.
hetinjo (Montri la profilon) 2013-junio-09 06:28:17
Harlinah:
Je préfère mes sentiments inutiles à ceci même si j'ai parfaitement compris que ce n’était pas ce que vous me préconisiez. Mais entre deux extrêmes , mon choix est fait.
Pourquoi :"extremes" ? Pourquoi pas un équilibre ? (ce qui est difficile à atteindre)
hetinjo (Montri la profilon) 2013-junio-09 06:47:34